La peur et la confiance

Ecouter le culte

Dimanche 22 mars 2020 – Plaisance – Prédication en visioconférence
Luc 1,26-30 ; Marc 5,21-24 et 35-36
Pasteure Marie-Pierre Cournot

La peur … Tout un programme ! Surtout en ce moment, où s’imbriquent peur personnelle et peur collective.
Je crois qu’il n’est pas inutile de faire, précisément en ce moment, le tour des racines de ce sentiment, des conséquences qu’il peut avoir pour nous et de ce qu’il met en jeu.

Tout d’abord la peur est un sentiment fort, qui vient du plus profond de notre être et nous bouscule. C’est bien ce qui arrive à Marie quand elle reçoit la visite de l’ange Gabriel qui lui dit cette chose inadmissible : Dieu t’as choisie.
Tout au long du Nouveau Testament, les personnages qui reçoivent la visite d’anges sont apeurés. C’est le cas par exemple des gardes romains, quand ils voient un ange descendre du ciel pour rouler la pierre du tombeau. L’évangile nous dit « ils tremblèrent de peur et devinrent comme morts ». (Mattieu 28,4).
De la même manière, les personnages qui se retrouvent devant Jésus sans savoir que c’est lui ou bien qui sont confrontés à ses miracles sont également pleins de peur. Par exemple dans le récit de la tempête apaisée, les disciples « furent saisis d’une grande crainte ; ils se disaient les uns aux autres : Qui est-il donc, celui-ci, que même le vent et la mer lui obéissent ? » (Marc 4,41).
La peur est donc dans la Bible la réaction courante face à la manifestation divine. Elle témoigne du vertige de frayeur que l’on peut ressentir devant l’inconnu et l’inattendu de ce qui est au-delà de nous mais aussi d’une certaine fascination devant le mystère, surtout s’il fait preuve d’une puissance qui nous dépasse. C’est exactement ce que nous fait cette épidémie dont nous ne maîtrisons pas encore bien les modes de propagation et pas du tout les moyens d’y mettre un terme.

Parfois la peur est si grande, elle s’enracine tellement profondément en nous, que nous pouvons en être marqués dans notre corps. Comme Zacharie qui, quand un ange vient lui dire que sa vieille femme Elisabeth sera enceinte du futur Jean-Baptiste, reste muet jusqu’à la naissance de l’enfant, ou comme Paul qui devient aveugle pour trois jours après que Jésus lui apparait sur le chemin de Damas (Actes 9,9).
Je crois que nous aussi risquons d’être aveugles, sourds ou paralysés, de perdre notre capacité de réflexion et d’analyse devant les bouleversements que nous vivons depuis une dizaine de jours.
Mais la peur peut aussi être positive, comme elle nous donne des ailes ou une force surhumaine quand la vie est en menacée. C’est cette force-là qu’il nous faut mobiliser du fond de notre peur actuelle et la transformer en détermination et en espérance.
La confiance que nous pouvons avoir en Dieu, en sa présence auprès de nous dans ces temps troublés, peut nous aider.
Il ne s’agit pas de croire que Dieu nous sauvera, nous les chrétiens ! Pas du tout. Je suis persuadée d’une part que ce n’est pas de son ressort, et d’autre part que si jamais ça l’était, il sauverait l’humanité entière puisqu’il l’a créée.
Non, mais la certitude que Dieu traverse lui aussi cette épreuve à nos côtés peut nous permettre de garder la tête froide.
Dans la Bible quand quelqu’un a peur devant une manifestation de Dieu, vient très souvent cette même parole que l’ange Gabriel dit à Marie : « N’aie pas peur ».
La peur peut-être chassée par la confiance, comme dans le récit de la guérison de la fille de Jaïros : « N’aie pas peur, crois seulement. » (Marc 5,36), où la foi est une des déclinaisons de la confiance.

Dieu n’est pas responsable de ce qui nous arrive, cette épidémie n’est pas une punition ou une vengeance divine que nous aurions méritée. Notre relation à Dieu se développe dans le registre de la confiance. Celle qu’il nous fait en nous offrant son amour sans rien attendre en échange et celle que nous lui faisons en le croyant. Pour autant, il ne s’agit de se croire invincibles. Et l’épidémie que nous affrontons nous le rappelle au quotidien où il est difficile de trouver la position juste entre la panique et l’imprudence qui nous ferait minimiser les risques, en particulier pour les personnes les plus fragiles devant ce virus. Car cette confiance nous engage et nous responsabilise. Il nous revient d’assumer pleinement notre responsabilité d’êtres humains, garants de nos frères et de nos sœurs. A nous aussi Dieu pourrait nous dire comme à Caïn « Où est ton frère ? […] Qu’as-tu fait ? » (Genèse 4,9-10).
Ne soyons donc pas un des maillons par lequel transitera le virus, respectons les mesures de confinement et de distanciation sociale ! Inventons d’autres moyens de faire vivre le respect de l’être humain, celui qui passe par l’entraide et nous fait prendre soin les uns des autres.

La confiance dans le Dieu de Jésus Christ qui demeure à nos côté dans l’épreuve peut être un levier pour que la peur ne nous paralyse pas, ne soulève pas en nous une vague de panique mais nous rappelle d’assumer notre responsabilité vis-à-vis de nos frères et sœurs. Grâce à la confiance c’est la face positive de la peur qui peut nous animer, nous re-animer, nous réanimer et nous sortir de cet effroi morbide qui nous guette.
Dieu nous fait confiance.
Amen

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