Dimanche 19 janvier 2020 – Plaisance – Culte avec le Defap – Prédication – Psaume 40
Marie-Pierre Cournot
Dans les premiers versets le psalmiste parle de Dieu et de tous les bienfaits dont Dieu l’a comblé.
Ça commence par une parole très forte : « J’ai espéré le Seigneur ».
Avec ce verbe à double sens, à la fois « attendre » et « fonder sa confiance en ».
La réponse de Dieu ne tarde pas « Il s’est incliné vers moi ».
« Il a entendu mes appels au secours ».
Ce Dieu est un Dieu qui entend, qui écoute, qui répond.
Un Dieu auquel on peut s’adresser, on peut parler.
Un Dieu de langage, de parole, qui dit une parole et qui tient parole.
Dans le Proche-Orient-Ancien, le peuple hébreu a développé une culture de la parole plus que de la vue ou de l’image.
Dans l’Ancien Testament, Yhwh ne se montre pas ou très peu.
Il est d’ailleurs interdit de le regarder et ceux qui le verraient risquent la mort.
Il est également interdit de le représenter sous forme de statue.
La relation que l’on a avec Dieu n’est pas prioritairement une relation de la vue mais avant tout de l’écoute et de la parole.
Car Dieu se fait entendre.
Soit directement, par exemple dans le désert, Dieu parle et parle et parle à Moïse.
Soit par l’intermédiaire de messagers, comme ceux qui viennent annoncer au vieil Abraham qu’il aura bientôt un fils malgré la stérilité de Sara sa femme.
La confession de foi du peuple hébreu, qui synthétise le premier commandement que Dieu leur donne, c’est « Écoute Israël, le Seigneur est notre Dieu, le Seigneur est un ! »
שְׁמַ֖ יִשְׂרָאֵ֑ל יְהוָ֥ה אֱלֹהֵ֖ינוּ יְהוָ֥ה ׀ אֶחָֽד
Écoute Israël !
Dans le Nouveau Testament, Dieu parle aussi beaucoup, à travers le corps, et la bouche, de Jésus, homme éminemment bavard.
Et parfois Dieu parle directement, deux fois, la première fois au baptême de Jésus (le passage que nous avons étudié dimanche dernier) quand les cieux s’ouvrent et qu’une voix se fait entendre pour dire « celui-ci est mon fils ».
La deuxième fois, c’est dans un passage que nous verrons dans 15 jours, au moment de la transfiguration, quand Dieu à la fois parle et se montre.
Quand Dieu parle, il ne s’agit pas juste
d’entretenir une conversation avec les êtres humains, il s’agit d’une parole créatrice :
Rappelons-nous le début de la Genèse.
Gen 1,3 : « Dieu dit : Qu’il y ait de la lumière ! »
Puis : « Dieu dit : Qu’il y ait une voûte au milieu des eaux pour séparer les eaux des eaux ! »
Et encore « Dieu dit : Que la terre produise des êtres vivants selon leurs espèces »,
« Dieu dit : Faisons les humains à notre image, selon notre ressemblance » etc…
Le fait que Dieu nous entende suffit pour le psalmiste à faire sortir du gouffre de la destruction, de la boue, de la fange.
C’est une écoute particulièrement puissante et efficace !
Une écoute qui remet debout, les pieds sur le roc, et qui donne l’assurance d’un pas ferme.
En réponse à cette écoute salvatrice, nait une parole, l’être humain accède au langage : « Il a mis dans ma bouche un chant nouveau, une louange à notre Dieu » (v.4).
Et au v. 6 « Rien n’est comparable à toi, je voudrais dire ces choses, les proclamer ».
Le verset 7 va encore plus loin : « Tu n’as pas pris plaisir au sacrifice ni à l’offrande : tu m’as ouvert les oreilles ; tu n’as pas demandé ni sacrifice ni holocauste pour le péché ».
Ce que Dieu nous demande ce ne sont ni sacrifices ni offrandes !
Je ne sais pas comment je vais faire tout à l’heure pour vous annoncer l’offrande !
Je vous dirai certainement, que l’offrande est le moment le moins important du culte, que Dieu n’attend pas que nous lui donnions de l’argent, que l’offrande est humaine et donc périssable, elle n’est ni créatrice, ni salvatrice.
Par contre la parole l’est !
Ce que Dieu attend de nous, c’est nos oreilles !
« Tu m’as ouvert les oreilles », littéralement en hébreu « tu as creusé pour moi deux oreilles ».
Et le verbe « creuser », c’est vraiment creuser dans la terre, creuser profond. C’est le verbe qu’on utilise pour creuser un puits ou même creuser une tombe !
Donc ce ne sont pas des petites oreilles, creusées en passant, superficiellement !
Non, c’est un vrai passage, un vrai canal, qui conduit à Dieu.
Quelque chose comme dit le psalmiste, qui rejoint nos entrailles.
Le livre-rouleau, celui qui a été écrit pour moi, pour que je l’entende, c’est la Bible, cet extraordinaire moyen d’accès à Dieu.
Qui a été fait pour moi, pour toi, pour vous.
C’est ce même livre-rouleau qui s’adresse à tous, qui nous parle pour que nous entendions et que nous connaissions Dieu.
C’est pour que nous l’entendions et aussi pour nous l’annoncions : « J’annonce la bonne nouvelle de la justice dans l’assemblée nombreuse, regarde je ne ferme pas mes lèvres, Seigneur, tu le sais ! ».
On a tous deux oreilles pour entendre et écouter, on a tous une bouche pour louer et annoncer.
Alors allons-y !
Nous pouvons tous entendre la parole que Dieu nous adresse dans la Bible et la proclamer à notre tour.
Dieu nous laisse l’initiative à chacun, et la méthode aussi.
L’assemblée à qui l’on s’adresse est nombreuse !
Variée, hétérogène, hétéroclite même !
C’est pour cela que nous avons tant de langues et de dialectes différents pour nous exprimer, tant de valeurs et de coutumes étonnantes pour exprimer la force créatrice de Dieu et la partager.
Imaginez un instant une humanité sans diversité, avec une norme et une seule qui s’appliquerait à tous.
Tout serait certifié conforme.
Non seulement on s’embêterait énormément, mais surtout où serait l’énergie créatrice de Dieu ?
Où serait la force vitale qui nous met debout et nous fait avancer ?
Il n’y aurait plus rien à découvrir puisque tout serait donné et déjà connu au départ.
Au début de cette prédication, nous avons réentendu le verset de la Genèse qui dit la parole de Dieu qui créé les humains à son image, à sa ressemblance.
Chaque être humain sur cette terre est donc une image de Dieu.
Mais quel est donc le visage de Dieu ?
Regardez-vous ! Il est multiple assurément.
En hébreu, le mot « visage » n’existe qu’au pluriel !
Nous avons chacun non pas un visage mais des visages. À l’image de Dieu.
Je sais bien qu’il est déroutant, inconfortable voir désagréable ou inquiétant de se sentir plongé dans un monde qui nous est étranger, par sa langue, ses coutumes, son histoire, ses valeurs, son organisation, sa théologie …
Alors si ça nous arrive, peut-être que ce Psaume peut nous aider.
D’abord pour se dire que chacun de nos frères, chacune de nos sœurs est un des visages de Dieu.
Et que chacun de nous est un visage de Dieu aux yeux des autres.
Ensuite, que le langage commun des êtres humains c’est cette parole que Dieu nous adresse pour qu’elle vienne, grâce à nos oreilles, travailler nos corps, nos entrailles et nos esprits.
Il n’y a personne qui soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Église, au centre ou à la périphérie, il n’y a que des personnes vers qui Dieu s’incline et dont il entend les appels au secours.
Cela n’est pas miraculeux ce que je vous dis !
Je sais que cela restera difficile parfois de se confronter à ce qui est différent dans notre monde.
Mais peut-être que si nous partageons nos difficultés alors c’est déjà un moyen de se parler et d’aller les uns vers les autres.
Voulez-vous essayer ?
Amen