Culte 13 juin : Venez et voyez !

Culte du 13 juin au temple de Montparnasse-Plaisance, prédication par Guillaume Chazel

Texte biblique : Jean 1,35-39
Il regarda Jésus qui passait et dit : « Voici l’agneau de Dieu ». Les deux disciples entendirent ces paroles et suivirent Jésus. Jésus se retourna, vit qu’ils le suivaient et leur dit : « Que cherchez-vous ? »
Il leur dit : « Venez et vous verrez ».

Prédication par Guillaume Chazel :
Voilà, nous sommes donc au début de l’évangile de Jean, au début de l’histoire. Ce texte est juste après le début de l’évangile de Jean, juste après 2 textes très connus.
D’abord le prologue : « Au commencement était la Parole », un texte qui annonce un Jésus divin, dans une forme unique, rythmée et résonnante, très musicale.
Et juste après le prologue, l’arrivée de Jean Baptiste, qui clame dans le désert et qui baptise la foule massée au bord du Jourdain, puis la présentation de Jésus par Jean avec la colombe…
Bref nous sortons d’un moment biblique plutôt grandiose.
Et nous entrons dans un moment plus intime.

Jean Baptiste, est là, on peut supposer qu’il se repose de ce qui s’est passé la veille, et peut être de tout ce qu’il a porté jusqu’à présent. Je pense qu’il est presque seul, que la foule de la veille est repartie, que
la poussière retombe. On sent un retour au calme.
Jean n’est pourtant pas tout à fait seul. 2 hommes sont restés. On ne connaît pas leurs noms pour le moment, et pour l’un d’entre eux on ne le connaîtra jamais. Une silhouette arrive.
Et soudain Jean Baptiste parle : « voici l’agneau de Dieu ». Les 2 hommes entendent ces mots et quittent Jean Baptiste pour suivre la silhouette qui passe. Et Jean Baptiste s’efface, avec élégance. Il dira plus loin « parce qu’il fallait qu’il grandisse et que moi je diminue».
A ce moment précis, commence la scène dont nous allons parler plus longuement. La silhouette se retourne. C’est Jésus.


La veille, un peu plus tôt dans l’évangile de Jean, Jésus était présenté comme la Parole divine, le Verbe.
Maintenant Jésus est un corps qui marche, puis un corps qui se retourne, un corps avec un regard qui dévisage, et enfin une voix qui parle et qui dit : « que cherchez-vous ? ». Il s’incarne totalement.
Jésus est homme.
C’est la première surprise, pour nous, mais surtout peut être pour les des 2 hommes qui le suivent depuis quelques instants. En effet, on peut penser qu’ils étaient partis pour marcher dans les pas d’une silhouette un peu lointaine. Et on peut penser qu’ils attendaient de cette silhouette lointaine qu’elle leur ouvre la voie,
peut-être même qu’elle ait la réponse à toutes les questions, voire, encore mieux, que la silhouette supprime les romains.
Bref, ils attendaient que cette silhouette fasse les choses que pourrait faire un Dieu.
Mais en fait pas du tout. Jésus est homme. Il est tourné vers eux, il les dévisage et il les questionne. Première surprise.

Deuxième surprise, ces premiers mots dits par Jésus : « que cherchez-vous ? ».
Ce sont les premiers mots de Jésus dans cet évangile, mais il ne prêche pas. Il n’annonce rien, il ne donne aucun message. Rien à voir avec ce qu’on attend a priori d’un prophète.
On ne peut même pas dire qu’il se présente ou qu’il accueille vraiment ceux qui vont devenir ses 2 premiers disciples, comme nous nous efforçons de le faire ici à Plaisance. On pourrait presque le trouver agressif d’ailleurs. Je m’adresse aux personnes récemment arrivées à Plaisance : imaginez si, en arrivant, vous aviez été accueillis par une personne incarnée et badgée bien sûr, et qui vous aurait demandé : « Que cherchez-vous ? ». Seriez-vous restés ? Je m’interroge.


Troisième surprise : non seulement Jésus n’affirme rien, ne prêche pas, mais il questionne, il s’intéresse aux personnes : « que cherchez vous », mais aussi peut être : « pourquoi êtes vous là », et en fait, « pourquoi voulez-vous me suivre ».
Et cette question se pose aussi pour nous aujourd’hui rassemblés ensemble dans ce temple ou par zoom : que faisons-nous ici ? C’est une invitation, ferme et forte, à commencer par nous interroger.
Pour certains, au début de leur histoire avec Jésus il y a une certitude.
Ici, et pour d’autres peut-être, au début de l’histoire avec Jésus, il y a une question, une exigence même. Une exigence parce que cette question nécessite de l’engagement, de la lucidité voire du courage,
pour ces 2 disciples, mais aussi pour nous. Que cherchez-vous ?
Et les disciples répondent à cette question par une autre question, magnifique : « ou demeure-tu ? ». C’est une question qui se déplie de multiples manières : ou demeure-tu, d’où viens-tu, ou te repose-tu,
qui es-tu….
Contrairement à leur habitude, les disciples visent juste. Ils échangent d’égal à égal avec Jésus fait homme. Le dialogue s’est installé, d’homme à homme, la relation avec Jésus se crée, et elle est équilibrée, et exigeante. Jésus surprend ces hommes, il les déstabilise, mais ils réagissent, respectueusement certes en le
nommant rabbi, mais en questionnant tout de même à leur tour.
Nous sommes très loin de la relation distante, verticale, des hommes à un gourou, qui ordonne, décide, et que l’on suit aveuglément, sans réfléchir, et je ne parle pas de questionner.


Et, le dialogue se poursuit avec la réponse de Jésus : « Venez et voyez », c’est le cœur de ce texte.
Que signifient ces mots ?
A première vue c’est assez simple : Je vous proposais tout à l’heure d’imaginer la scène. Ici on pourrait
imaginer que Jésus en disant ces mots a le bras tourné vers lui. On pourrait comprendre alors : « Venez et vous verrez ce dont je suis capable ». Ou alors « Suivez-moi, ouvrez grand vos yeux et vous
comprendrez qui je suis ».
Et c ‘est un peu ce qui va se passer.
Le groupe des disciples va se constituer dans la suite de Jean 1. Ils vont être ses témoins, puis témoigner encore et encore jusqu’à nous aujourd’hui dans ce Temple et sur zoom, et c’est très bien.
C’est très bien, mais si on entend ce “venez et voyez” comme ça, on revient ici un peu vers les disciples suiveurs, un peu passifs, dont nous avons déjà parlé, et qui attendent de Jésus qu’il fasse le genre
de choses que fait Dieu : des miracles, la destruction des ennemis, et j’en passe.
C’est simple, mais vous vous rendez bien compte que c’est un peu trop simple, et que d’ailleurs lorsqu’ils vont suivre Jésus comme cela, les disciples vont certes témoigner, mais aussi parfois passer à côté de
quelque chose. Mais de quoi ?


Alors, je vous propose une deuxième approche de ce « venez et voyez », assez différente.
Cette fois, je vous propose d’imaginer Jésus, le bras ouvert, vers l’extérieur, vers le monde. On pourrait entendre ce « Venez et voyez » là comme cela : “marchons ensemble et ouvrez les yeux, regardez
autour de vous avec un regard neuf”.
On se rappelle qu’on est ici au début d’une histoire. Les disciples face à Jésus et nous tous les matins devant notre miroir ou ici au Temple ou par zoom nous sommes au début d’une histoire.
Comme c’est le début de l’histoire, nous avons un regard neuf, et nous nous en servons. Vous voyez cette homme ou cette femme ? que nous croisons sur la route pour la première fois, ou que vous connaissez depuis toujours, sur la route ou assis sur le banc au Temple à côté de vous, ou sur la page zoom ? Je m’adresse en particulier aux paroissiens qui sont sur zoom, en les invitant et
allumer leur caméra, parce qu’ils ont la chance de se voir de face.
Venez et voyez, regardez-vous.
Jésus nous dit : cette femme et cet homme que vous voyez, ils sont ma demeure. Ils sont grands ou petits, riches ou pauvres, faibles ou forts, malades ou pas, heureux ou malheureux. Tous, ils sont la demeure de Jésus, qui nous suggère avec ces mots « Venez et Voyez » de les regarder d’un œil neuf, de les reconnaître et de les aimer.
Et au-delà, ces paysages, ces montagnes, ces lacs et fleuves, ces terres cultivées ou non, ces animaux, ces villes et villages que Jésus et ses disciples vont traverser et dans lesquels nous vivons aujourd’hui,
regardons les aussi comme on regarde les choses au début des histoires. Voyons le monde comme nous ne l’avons jamais vu, le monde lui aussi est la demeure de Jésus, la création magnifique de
Dieu.
Il y a, me semble-t-il, dans ce deuxième « venez et voyez », avec le bras ouvert vers l’extérieur, un encouragement à l’émerveillement pour l’humanité et pour le monde. Et après cet émerveillement, un
très net encouragement à aimer l’humanité et le monde, et à en prendre soin bien-sûr.

Mais, peut-être, vous pourriez me dire, cette deuxième lecture est-elle un peu forcée ou exagérée. Il n’est pas si facile de s’émerveiller à volonté. Peut-être est-ce que cela ressemble à une injonction un peu trop forte.


Alors, pour finir, je vous propose une troisième lecture de ce « venez et voyez », que j’espère un peu plus légère.
Dans ce « venez et voyez », Jésus est tourné vers nous, il tend le bras vers nous, et il nous dit tout simplement « Venez avec moi, nous allons faire un bout de chemin ensemble ». Un petit bout, un grand
bout, on verra bien.
D’ailleurs, vous vous souvenez que dans cette histoire, il y a 2 disciples. On verra dans la suite du texte qu’un des disciples s’appelle André, il va suivre Jésus jusqu’au bout. Mais l’autre n’est pas nommé.
Il est juste dit “il restèrent avec lui jusqu’à la dixième heure”. J’aime à me dire que cet autre disciple n’est pas forcément resté après la dixième heure. Il a fait un petit bout de chemin, puis il a suivi sa
propre route. Cela arrive, et il n’y a aucun reproche. Au contraire, Jésus nous aime libre, de le suivre, et libre de partir. Et même quand on part, on a sa place dans l’histoire, ici dans l’évangile de Jean.
J’aime à penser que quand à ce moment, Jésus nous propose avec ces mots “venez et voyez” de le suivre pour faire un bout de chemin, il nous donne trois conseils.

Le premier conseil de Jésus, c’est de venir à plusieurs, comme ces deux disciples qui vont être très vite beaucoup plus nombreux. Mais aussi comme nous à Plaisance, dans ce temple ou sur zoom, au culte
ou dans les groupes de la paroisse. Jésus aime me semble-t-il se promener avec des groupes nombreux et animés, ou, comme on l’a vu, on discute ferme, on échange, on se questionne, on va au fond des choses. Premier conseil : “ne restons pas seuls, venons nombreux”.

Le second conseil de Jésus est dans ce « voyez », assez différent d’un plus attendu « écoutez ma parole ». Jésus aurait pu dire : “Venez et écoutez ma parole”. Mais il a dit “Venez et voyez”. Nous, protestants, pouvons être très attachés au texte biblique et donc à la Parole, ou à des choses très spirituelles ou théologiques comme la foi ou la grâce.
La grâce avant les oeuvres, on aime bien. Ça fait partie de notre ADN.
Il n’en demeure pas moins que Jésus a été, comme on l’a vu, un homme totalement incarné.
Et si il a parlé et prêché, il a surtout vécu, et agit. Et s’ il nous invite certainement à écouter sa parole, il nous invite surtout avec ce “voyez”, à regarder ce qu’il a fait, son action , et ensuite, pour demeurer avec lui, il nous suggère d’agir dans le monde. Donc deuxième conseil : “Agissons”.

Le dernier conseil de Jésus, qu’on entend dans la brièveté et la simplicité de la formule “venez et voyez”, ce serait me semble t il de voyager léger, de faire simple. Par ces mots simples, Jésus nous conseille de laisser derrière nous nos bagages, nos questions, nos habitudes, nos traditions du passé, nos “on a toujours fait comme ça”, mais aussi nos bonnes résolutions, nos “je dois faire ça pour réussir ma vie, pour respecter mes principes” et j’en passe.
Troisième conseil donc, Jésus nous dit quelque chose comme : « voyageons léger et laissons le Seigneur agir dans nos vies », et alors tout sera transformé et notamment notre rapport au monde, aux
autres, et à nous même.
Voilà.
C’était le début d’une histoire, la nôtre ou celle de l’évangile de Jean, et dans cette histoire, Jésus nous a dit : Venez et voyez, et le Seigneur fera toutes choses nouvelles.
C’est le début de l’histoire. Il suffit de faire un premier pas avec Jésus, puis un bout de chemin, et puis on voit ce qui se passe, et finalement on change le monde.
Amen

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